L’entrée du collège de Kerhallet à Brest. (Photo d’archives René Pellen)

Dans une lettre adressée au président du conseil départemental du Finistère, les présidents des associations Koun Breizh, Yvon Ollivier, Sked, Bernard Gestin, et Skol-Uhel ar Vro, Jacky Flippot, protestent, au nom de la défense de la langue bretonne, contre l’annonce d’un changement de nom prochain du collège brestois de Kerhallet.

Nous venons d’apprendre dans la presse l’intention du conseil départemental du Finistère de débretonniser le collège de Kerhallet, à Brest, pour lui donner une nouvelle appellation conforme à ce qui se passe partout ailleurs en France. Un concours pour trouver une nouvelle appellation est lancé. Un vote est d’ores et déjà prévu pour la fin du mois de mars.

Il ne s’agit ni plus ni moins que d’une manifestation supplémentaire de la débretonnisation larvée de notre territoire, sans que personne ou presque n’y trouve à redire. S’il importe de donner à nos écoles des noms de femmes célèbres, au nom de quoi faudrait-il le faire au préjudice d’une langue minoritaire en danger d’extinction ? On trouve toujours une bonne raison pour débretonniser !

Faut-il rappeler que l’urbanisation, quand elle s’étend sur des parcelles agricoles portant encore des appellations bretonnes millénaires, engendre de nouveaux noms aussi significatifs que « rue des Jonquilles » ? Faut-il rappeler que, suite à la loi 3DS relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, toutes les communes de moins de 2 000 habitants doivent désormais faciliter la tâche de la Poste en donnant une désignation à chaque voie et lieu-dit ? Pour une commune comme Plouégat-Guérand qui souhaite conserver son patrimoine linguistique, combien d’autres communes bretonnes n’y trouvent rien à redire et débretonnisent à tout va, sans même voir le problème ?

C’est un véritable rouleau compresseur qui s’abat sur la Bretagne et nous trouvons fort dommageable que le conseil départemental du Finistère emprunte le même chemin. Vous ne pouvez, d’un côté, nous assurer de vos meilleures intentions à l’égard de la langue bretonne et, de l’autre, permettre à vos services de poursuivre la débretonnisation de notre vieux pays.

Alors certes, il ne s’agit que d’un nom de collège mais ce nom-là a l’avantage d’être millénaire et de rappeler aux plus jeunes qu’ils ne viennent pas de nulle part ou de la banlieue parisienne, mais bien de Bretagne. Ce vocable est encore lié étroitement au territoire. Au lieu de débretonniser ce collège, il faudrait, au contraire, que les enseignants ouvrent l’esprit des élèves à leur passé, à leur territoire ainsi qu’à l’existence de la langue bretonne. Ils pourraient même songer à l’enseigner dans le cadre d’une filière bilingue.

Notre patrimoine toponymique est en grand danger. Sa préservation rencontre les engagements internationaux de la France qui a signé la convention de l’Unesco pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Aussi, nous vous demandons, Monsieur le président du conseil départemental, de renoncer à la débretonnisation du collège de Kerhallet et d’envisager toute action qui permettrait de sauvegarder notre patrimoine toponymique et linguistique, gravement menacé. Nous nous tenons à votre disposition pour échanger sur ce sujet et rechercher toute solution susceptible de protéger au mieux notre patrimoine culturel. Notre patrimoine toponymique doit être sacralisé aujourd’hui. Notre différence, ce qui nous relie, est le meilleur atout de la Bretagne.

Le Télégramme – 21/03/2023

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